LeSpleen de ParisCommentaires sur cet exemplaire : Couverture légÚrement défraßchieLivre d'occasion écrit par Charles Baudelaireparu en 1971 aux éditions .
Deses marges (« Les Veuves », « Les Yeux des pauvres »), de sa violence (« Le GĂąteau ») et de son irrationalitĂ© peuvent naĂźtre un fantastique urbain (« La Corde ») Ă travers lequel Baudelaire rejoint souvent Edgar Poe. Mais, nĂ©gation mĂȘme de l'art, figure du mal, la grande ville, tout en Ă©tant Ă©piphanie du moderne, est
LeGĂąteau; Charles Baudelaire (1821-1866) Recueil : Le Spleen de Paris (Posthume - 1869) Le Vieux Saltimbanque. Partout sâĂ©talait, se rĂ©pandait, sâĂ©baudissait le peuple en vacances. CâĂ©tait une de ces solennitĂ©s sur lesquelles, pendant un long temps, comptent les saltimbanques, les faiseurs de tours, les montreurs dâanimaux et les boutiquiers ambulants, pour compenser les
Spleende Paris, le [Charles Baudelaire] - Fiche de lecture. 1 PRĂSENTATION Spleen de Paris, le [Charles Baudelaire], recueil de poĂšmes de Charles Baudelaire, publiĂ© Ă titre posthume en 1869 sous le titre Petits PoĂšmes en prose. 2 SORTIR DE LA POĂSIE Baudelaire en commence la rĂ©daction en juillet 1857, au lendemain de la publication des Fleurs du mal.
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Vay Tiá»n Nhanh Ggads. DĂ©cryptage de la semaine Un vrai pays de Cocagne, oĂč tout est beau, riche, tranquille, honnĂȘte ; le luxe a plaisir Ă se mirer dans lâordre ; oĂč la vie est grasse et douce Ă respirer ; dâoĂč le dĂ©sordre, la turbulence et lâimprĂ©vu sont exclus ; oĂč le bonheur est mariĂ© au silence [âŠ] oĂč tout vous ressemble, mon cher ange. Charles Baudelaire, Lâinvitation au voyage, in. Le spleen de Paris 1869 On ne pourrait trouver plus belle dĂ©finition du pays de Cocagne que ce poĂšme. Mais oĂč trouve-t-on ce pays utopique ? RĂ©ponse avec le dĂ©cryptage du Oâ, la rubrique oĂč tous les pays sont beaux ! LâĂ©tymologie, ce nâest pas du gĂąteau ! Quoi de plus logique que de commencer un sujet sur lâutopie par⊠une controverse ! En effet, le pays de Cocagne a une Ă©tymologie trĂšs discutĂ©e. Cocagne est un nom masculin attestĂ© depuis le milieu du XIIIe siĂšcle en langue française. Le terme viendrait Dâun texte en ancien français, en 1250 environ, le Fabliau de Coquaigne qui dĂ©crit ce pays de fĂȘtes continuelles, du luxe et dâoisivetĂ©. Il reprend le conte nĂ©erlandais Dit it van dat edele lant von Cockaenghen Voici le noble pays de Cocagne. De lâitalien cuccagna XIVe siĂšcle, qui dĂ©signe un canton du mĂȘme nom sur la route de Rome Ă Loreto, en Italie. Au XVIIe siĂšcle, Ă Naples, se dĂ©roulait une fĂȘte cĂ©lĂ©brant le VĂ©suve. On Ă©rigeait une sorte de monticule censĂ© reprĂ©senter le volcan dâoĂč jaillissaient viandes, charcuteries et vins ». On appelait ce monticule cocagna, en hommage Ă Cuccagna, rĂ©putĂ©e pour sa vie facile et bon marchĂ©[1]. Cocagne pourrait dĂ©river de lâespagnol cucaña. XVIIe siĂšcle. En moyen français, il faut relever cocagne pour pastel en pĂąte » 1463, quoquaigne. Le terme est lui-mĂȘme empruntĂ© au provençal cocanha, coucagno, de mĂȘme sens. Il est notable que la culture du pastel engendra une grande prospĂ©ritĂ© dans le Haut-Languedoc un pays de Cocagne, en somme. En plus du pastel, le provençal se rapproche aussi du terme coca pour coque » vers 1350 ou gĂąteau » 1391, coga. On a aussi Ă©voquĂ© lâĂ©tymon germanique °koka dâorigine onomatopĂ©ique allemand Kuchen, anglais cake gĂąteau », le pays de Cocagne Ă©tant le pays des friandises. LâintermĂ©diaire serait le moyen bas allemand kokenje, ou °kokania formĂ© sur le modĂšle de Germania Germanie ». Lâanglais Ă©voque Land of cokaygne / cockaigne dĂ©but XIVe siĂšcle Le pays de Cocagne aujourdâhui Le mot dĂ©finitif est apparu en 1533 comme le nom dâun pays imaginaire oĂč tout est riant et en abondance pays de Cocagne. EmployĂ© anciennement au sens de fĂȘte, rĂ©jouissance », cause de rĂ©jouissance », le mot survit dans mĂąt de cocagne ou pour connoter une abondance facile.[2] Câest Cocagne, encore utilisĂ©e aujourdâhui en Provence, signifie câest facile ». Hannibal LECTEUR Et lâutopie dans tout ça ?! Si le pays de Cocagne est un endroit oĂč lâon trouve de tout en abondance, peut-on parler dâutopie ? Tournons-nous vers la peinture pour rĂ©pondre Ă cette question. En 1567, la rĂ©volte des Gueux[3] bat son plein. Alors que Bruxelles est mise Ă feu et Ă sang par les troupes du duc dâAlbe, le peintre Pieter Bruegel se rĂ©fugie dans son art. Il peint son Pays de Cocagne. Le Pays de Cocagne, par Pieter Brueghel lâAncien 1567-1569 Le tableau reprĂ©sente les trois ordres de la sociĂ©tĂ© mĂ©diĂ©vale un clerc, un chevalier et un paysan. Ils dorment sous un arbre qui porte une table couverte de mets. Ils ont lâair repus et paisibles. La symbolique est forte puisque tous trois sont Ă©gaux dans lâabondance et la quiĂ©tude. Ici, les soldats ont dĂ©posĂ© leurs armes, les agriculteurs leur flĂ©au, les Ă©tudiants se couchent sur leurs livres, pour une trĂȘve perpĂ©tuelle sous les auspices dâune nature gĂ©nĂ©reuse. Le pays de Cocagne peut ĂȘtre vu comme une expression de lâaspiration Ă la prospĂ©ritĂ© universelle, Ă la paix et Ă lâĂ©galitĂ©, un paradis terrestre. Une utopie, en somme. En bonus Lâinvitation au voyage, ou le pays de Cocagne de Charles Baudelaire, in. Le spleen de Paris 1869 [1] Source Petite histoire des expressions, Gilles HENRY, Marianne TILLIER, Isabelle KORDA, p. 134-135. [2] Source LE ROBERT, Dictionnaire historique de la langue française. [3] La rĂ©volte des Gueux est un Ă©vĂ©nement qui a lieu aux Pays-Bas espagnols Ă partir de 1566 et dont le chef de file est Guillaume dâOrange. Le soulĂšvement, rĂ©clamant la libertĂ© religieuse, dĂ©bouche sur la guerre de Quatre-Vingts Ans, opposant les rĂ©voltĂ©s nĂ©erlandais Ă lâEmpire espagnol. Retrouvez notre prĂ©cĂ©dent DĂ©cryptage â Lâutopie, concept et genre littĂ©raire
imiter et par lĂ elle touche Ă l'art musical et Ă la science mathĂ©Âmatique la ligne horizontale, la ligne droite ascendante, la ligne droite descendante ; qu'elle peut monter Ă pic vers le ciel, sans essoufflement, ou descendre perpendiculairement vers l'enfer avec la vĂ©locitĂ© de toute pesanteur ; qu'elle peut suivre la spirale, dĂ©crire la parabole, ou le zigzag figurant une sĂ©rie d'angles superposĂ©s... Notes en vue d'une prĂ©face aux Fleurs du maL publiĂ©es dans les Ćuvres posthumes. Ătude de la technique des portraits, particuliĂšrement nomÂbreux dans le recueil. Ătude de la technique de la description et en particulier le traitement du paysage, qui s'appuie dans le Spleen sur des anaÂlogies intĂ©ressantes Ă analyser voir par exemple le dĂ©but de Le GĂąteau XV, la description de la nuit Ă la fin du CrĂ©Âpuscule du soir XOM ; le paysage de Les Projets XXIV qui est celui d'une gravure et non celui de la nature. L'Ă©tude peut aboutir Ă la conception exposĂ©e dans Les FenĂȘtres XXXV la rĂ©alitĂ© extĂ©rieure n'a d'intĂ©rĂȘt que si elle m'a aidĂ© Ă vivre, Ă sentir que je suis et ce que je suis. Pour une Ă©tude systĂ©matique de la forme d'un poĂšme on pourra partir des diverses dĂ©finitions donnĂ©es par l'auteur lui-mĂȘme. Dans la dĂ©dicacĂ© le miracle d'une prose poĂ©tique, musiÂcale, sans rythme et sans rime... p. 20. Consignes possibles relever les effets de rythme, les retours de sonoritĂ©s, les jeux d'anaphores, les ruptures, les crescendo par exemple dans Ănivrez-vous , XXIII, les retombĂ©es, les refrains. 5. Ătude du rapport entre Les Fleurs du mal et Le Spleen de Paris sur ce point, voir la PrĂ©face d'Yves Florenne, pp. 10-12. On peut rapprocher prĂ©cisĂ©ment le recueil en prose de la deuxiĂšme partie des Fleurs du mal Tableaux parisiens . Mais de façon plus gĂ©nĂ©rale, tous les thĂšmes que l'on Ă©tudiera dans le recueil en vers gagneront Ă ĂȘtre mis en perspective grĂące Ă tel ou tel des poĂšmes en prose. Pour la structure de l'ensemble, Baudelaire invite Ă opposer la construction des Fleurs du mal et la libertĂ© ou la tortueuse fantaisie du Spleen on peut faire dĂ©gager les significations de la mĂ©taphore du serpent utilisĂ©e dans la dĂ©dicace et la rapprocher du Thyrse . Faire systĂ©matiquement la comparaison des doublets Le CrĂ©puscule du soir CrĂ©puscule du soir , L'Examen de minuit , La Chevelure Un hĂ©misphĂšre dans une cheÂvelure , L'Invitation au voyage , Les Sept Vieillards Les Veuves , Les Petites Vieilles Le DĂ©sespoir de la vieille , Bien loin d'ici La Belle DorothĂ©e , L'HorÂloge , Le Voyage N'importe oĂč hors du monde .
1 Voir BeauzĂ©e, Dumarsais, le Dictionnaire de lâAcadĂ©mie, Fontanier, etc... 1Un baudelairien, fĂ»t-il stylisticien, ne peut se dĂ©faire dâun goĂ»t certain pour le calembour, la plaisanterie dandy », le titre pĂ©tard ». Le titre retenu pour cette contribution constitue une sorte de pied de nez ou de clin dâĆil Ă la tradition grammaticale et rhĂ©torique1, qui distingue la syllepse de la personne », la syllepse du nombre » et la syllepse du genre », puisque le genre » de mon propos ne relĂšve pas de lâanalyse dite grammaticale, ni mĂȘme dâune rhĂ©torique oratoire ou restreinte, mais plutĂŽt de lâanalyse discursive ou dâune rhĂ©torique quâon pourrait appeler gĂ©nĂ©rale, Ă lâinstar du Groupe ÎŒ. 2 M. Aquien, Dictionnaire de poĂ©tique, Livre de Poche, Paris, 1993, entrĂ©e Syllepse » La sylleps ... 2Rappelons briĂšvement que la syllepse2 nâapparaĂźt quâassez tardivement dans nos traitĂ©s de rhĂ©torique au xviie siĂšcle, et, quâempruntĂ© au bas latin des rhĂ©toriciens, le terme rĂ©fĂšre traditionnellement â comme le confirment encore aujourdâhui la plupart des dictionnaires usuels â Ă un accord grammatical selon le sens. La syllepse » est Ă©tymologiquement de la mĂȘme famille que la syllabe » et constitue une forme spĂ©cifique dâassemblage renvoyant Ă une comprĂ©hension dâĂ©noncĂ© oĂč des Ă©lĂ©ments ont Ă©tĂ© rĂ©unis de maniĂšre double il est donc lĂ©gitime de parler Ă propos de la syllepse dâambiguĂŻtĂ© et dâambivalence, ce qui conduit Ă envisager Ă©galement les questions de valence et de valeur. 3GĂ©nĂ©ralement classĂ©e parmi les figures de construction, la syllepse se dĂ©double relativement tĂŽt en figure de construction et en figure de sens, cette classification, qui reprend Ă son compte la syllepse oratoire » de Dumarsais, Ă©tant devenue aujourdâhui traditionnelle. Ce qui semble dâores et dĂ©jĂ Ă retenir, câest que la syllepse est plutĂŽt segmentale ce ne serait donc pas une macro-figure » elle porte sur un Ă©noncĂ© relativement restreint et dĂ©pend du cotexte et du contexte pour ce qui concerne son interprĂ©tation. Elle semble aisĂ©ment isolable et peut sâapparenter au jeu de mots », Ă la maxime calembour », et constituer une sorte de tĂ©lescopage grammatical, syntaxique ou sĂ©mantique. Elle semble Ă premiĂšre vue se dĂ©velopper de maniĂšre syntagmatique. Comme le syllogisme et lâenthymĂšme, elle fait appel Ă la coopĂ©ration du lecteur. Ainsi lâexemple suivant Il mourut dĂ©capitĂ© sur lâĂ©chafaud, guillotinĂ©, mais la tĂȘte haute. 4InterrogĂ©e dans toutes ses manifestations et dans la diversitĂ© de ses occurrences, la syllepse reste une figure » difficile Ă Ă©lucider, et plus on se penche sur elle, plus lâopposition entre syllepse grammaticale », syllepse syntaxique » et syllepse dite oratoire » semble perdre de sa lĂ©gitimitĂ©. Dans tous les cas, on peut constater un phĂ©nomĂšne de condensation linguistique par suite dâinterfĂ©rence sĂ©mantique entre des expressions plus ou moins usuelles, plus ou moins stĂ©rĂ©otypĂ©es ou figĂ©es. Ainsi dans lâexemple suivant La plupart des gens sont bien portants. 5Lâaccord peut se faire au pluriel non seulement pour une question de sens », mais aussi pour une raison de nombre », la plupart » Ă©tant exclusif de lâunitĂ©. Dâun point de vue logico-sĂ©mantique et grammatical, les deux occurrences La plupart des gens est bien plupart des gens sont bien portants. 6ont une lĂ©gitimitĂ© assurĂ©e. 7Si lâon se rĂ©fĂšre Ă un autre exemple, frĂ©quemment donnĂ© dans les traitĂ©s ou manuels de rhĂ©torique et de grammaire 3 Racine, Andromaque. BrĂ»lĂ© de plus de feux que je nâen 4 Voir M. Le Guern, SĂ©mantique de la mĂ©taphore et de la mĂ©tonymie, Paris, Larousse, coll. Langue e ... 8on voit que Racine actualise dans feux » deux expressions usuelles dans les emplois de lâĂ©poque, lâun, allumer des feux », rĂ©fĂ©rant aux incendies du temps de guerre4, lâautre Ă lâexpression de la passion amoureuse, brĂ»ler dâun feu... ou de feux... pour quelquâun » association figurĂ©e de lâamour et de la consomption. Michel Le Guern prĂ©cise 5 Ibid. [...] il sâagit du cumul par le mĂȘme terme du sens propre et du sens mĂ©taphorique [...]. Le mot feux » dĂ©signe Ă la fois au sens propre les incendies allumĂ©s par Pyrrhus lors de la prise de Troie et au sens figurĂ© sa passion pour 9Fontanier classe cette condensation syntagmatique selon des relations de contiguĂŻtĂ©, de transfert ou dâinclusion mĂ©tonymie, mĂ©taphore, synecdoque. Michel Le Guern affirme, quant Ă lui, que 6 Op. cit., pp. 111-112. [...] le lien de la syllepse avec la mĂ©taphore et la mĂ©tonymie nâest quâaccidentel. Pour quâil y ait syllepse, il suffit quâil y ait polysĂ©mie du terme employĂ© ; la mĂ©taphore et la mĂ©tonymie ne sont que des cas particuliers de 10Ce qui paraĂźt intĂ©ressant dans la syllepse, câest quâelle condense deux structures syntagmatiques diffĂ©rentes sans relation dâinvalidation, dâopposition ou dâexclusion. Elle implique un double savoir linguistique du lecteur â dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale, une bonne connaissance des registres â et sâinscrit dans un principe de coopĂ©ration, pour utiliser la terminologie des thĂ©oriciens de lâĂcole de Constance ». 11Mon propos nâest pas fondĂ© sur un examen approfondi de la syllepse telle que grammairiens, rhĂ©toriciens, linguistes et stylisticiens la connaissent et lâapprĂ©hendent dans leur diversitĂ©, mais correspond Ă une tentation heuristique, celle de transporter la polysĂ©mie de la syllepse du segmentai au suprasegmental devenue macrostructurale, la syllepse sâinscrit alors dans la problĂ©matique des genres, telle que la pose la littĂ©rature dite de la modernitĂ©. Et le premier corpus exploratoire susceptible dâĂȘtre pertinent qui retienne mon attention est Le Spleen de Paris de Baudelaire. 7 Quâest-ce quâun genre littĂ©raire ?, Ăditions du Seuil, coll. PoĂ©tique », Paris, 1989. 8 Le mot est Ă prendre ici dans un sens positif, tel que dans lâusage de la langue anglaise la d ... 12Il ne saurait ĂȘtre question de reprendre ici lâensemble des travaux qui concernent la ou les thĂ©ories des genres, dâautant que les recherches de Jean-Marie Schaeffer7 ont montrĂ© que, sortie de lâhistoricitĂ©, la discussion ne peut quâaboutir Ă des apories. Historiquement en effet, les genres littĂ©raires ont pu trouver momentanĂ©ment, dans un laps de temps repĂ©rable, des dĂ©finitions possibles. Il a mĂȘme Ă©tĂ© proposĂ© de considĂ©rer tout genre littĂ©raire comme un organisme vivant, dont la naissance peut ĂȘtre datĂ©e, qui finit par trouver son apogĂ©e, et qui dĂšs lors est condamnĂ© Ă la dĂ©cadence et Ă la mort. Lâon sait que de toutes façons, il nâest guĂšre acceptable dâaborder la notion par le biais classificatoire de catĂ©gories statiques, mais par une comprĂ©hension conceptuelle dynamique les genres littĂ©raires continuent Ă fournir des cadres â si lâon prĂ©fĂšre, des codes variables, changeants, modifiables en permanence â de lisibilitĂ©, puisquâils inscrivent tout texte », dâune part, dans des pratiques discursives plus ou moins validĂ©es par la communautĂ© linguistique, et dâautre part, dans une situation dâattente du ou des lecteurs impliquant tout Ă la fois satisfaction et dĂ©ception »8. 13De crise du vers en crise du livre, de crise des reprĂ©sentations en crise des repĂšres Ă©thiques et esthĂ©tiques, le formatage » gĂ©nĂ©rique, dont on sait quâil conditionne la production » comme la consommation » de lâobjet littĂ©raire, sâest lui aussi retrouvĂ© en crise. Pour Baudelaire, la modernitĂ© â câest-Ă -dire la mise Ă jour du poĂ©tique » dans le prosaĂŻque » â pose le problĂšme de la forme poĂ©tique malgrĂ© toutes les transgressions apportĂ©es par le dĂ©veloppement du Romantisme, le vers continue Ă ĂȘtre perçu comme constitutif du poĂšme, et le vers libre, qui est pour bientĂŽt, attendra cependant quelque temps pour ĂȘtre inventĂ©. Toutefois, les traductions de Poe, lâhĂ©ritage des IdĂ©ologues, le Gaspard de la nuit dâAloysius Bertrand et sans doute un ardent dĂ©sir de trouver du nouveau » ont vraisemblablement motivĂ© ce pendant » des Fleurs du Mal, quâon appelle aujourdâhui Le Spleen de Paris, avec le sous-titre de petits poĂšmes en prose », qui constitue vraisemblablement une syllepse de type inclusif synecdoque. 9 Ch. Baudelaire, Le Spleen de Paris, XIX, Le Joujou du pauvre ». 10 Voir D. Alexandre et P. Brunei, Le Recueil, Klincksieck, Paris, 2000. 11 PiĂšce no II du Spleen de Paris. 14La syllepse du genre » consiste dans la plupart des poĂšmes Ă investir des structures et des modalitĂ©s discursives caractĂ©ristiques de la prose, aisĂ©ment identifiables par le lecteur et correspondant au prosaĂŻsme de la vie moderne, et Ă construire Ă lâintĂ©rieur de cette structure en prose un paradigme poĂ©tique qui seul peut donner sens en profondeur Ă lâorganisation syntagmatique de surface. LâĂ©criture a pour objet de donner Ă voir la beautĂ© » que seul un un Ćil impartial » peut dĂ©couvrir si, comme lâĆil du connaisseur devine une peinture idĂ©ale sous un vernis de carrossier, il le nettoyait de la rĂ©pugnante patine de la misĂšre »9. La syllepse se construit sur un systĂšme de rĂ©gie discursive dont lâemblĂšme symbolique pourrait ĂȘtre la figure de Janus. Dâun point de vue gĂ©nĂ©rique, les cadres » ou les modĂšles » affichĂ©s dans Le Spleen de Paris appartiennent visiblement Ă la prose ; toutefois la distribution Ă©noncĂ©/Ă©nonciation » est parsemĂ©e dâindices marquant clairement les limites dâintelligibilitĂ© de ces cadres » ou modĂšles ». Dâautres indices motivent une reconstruction interprĂ©tative de type poĂ©tique passant par lâavĂšnement dâun nouveau sujet lyrique il y a syllepse », parce quâest manifeste un nouveau mode du dire poĂ©tique », visant Ă rĂ©accorder voix prosaĂŻque et voix poĂ©tique. Lâaffichage de la prose nâest pas Ă dĂ©montrer, puisquâil est inscrit dans le sous-titre. On peut cependant remarquer que la construction du recueil, bien quâhypothĂ©tique â Le Spleen de Paris est restĂ© inachevĂ© â, relĂšve de lâexposition poĂ©tique, comme jâai pu le montrer dans une autre Ă©tude10. Les indices de modĂ©lisation gĂ©nĂ©rique complexe » sont souvent nombreux, bien que plus ou moins transparents ou opaques. Ils peuvent ĂȘtre trĂšs explicites, tout particuliĂšrement sous la forme dâune double clĂŽture du poĂšme en prose », lâune fermant la logique du discours prosaĂŻque, lâautre indiquant le rĂ©investissement poĂ©tique du modĂšle affichĂ©. Ainsi dans Le DĂ©sespoir de la Vieille »11, la premiĂšre partie de la conclusion correspond Ă la triste fin de lâanecdote Alors la bonne vieille se retira dans sa solitude Ă©ternelle, et elle pleurait dans un coin, [se disant ] 15tandis que le se disant » introduit au discours direct une lĂ©gende », ou, si lâon prĂ©fĂšre, une mĂ©ditation sous forme de moralitĂ© », rapprochant la petite vieille ratatinĂ©e » de LâĂtranger », figure emblĂ©matique du poĂšte et premiĂšre piĂšce du recueil â Ah ! pour nous, malheureuses vieilles femelles, lâĂąge est passĂ© de plaire, mĂȘme aux innocents ; et nous faisons horreur aux petits enfants que nous voulons aimer ! 16 La vieille femme » ou la femme vieillie » est un thĂšme baudelairien rĂ©current, qui cristallise de la part du poĂšte un mouvement paradoxal, puisquâil associe la sympathie et la rĂ©pulsion. AprĂšs avoir rĂ©actualisĂ© le clichĂ© du retour Ă lâenfance » communĂ©ment appliquĂ© Ă la vieillesse La petite vieille ratatinĂ©e se sentit toute rĂ©jouit en voyant ce joli enfant [...] ; ce joli ĂȘtre, si fragile comme elle, la petite vieille, et, comme elle aussi, sans dents et sans cheveux. 17le poĂšte souligne le cruel dĂ©calage entre les deux personnages Mais lâenfant Ă©pouvantĂ© se dĂ©battait sous les caresses de la bonne femme dĂ©crĂ©pite, et remplissait la maison de ses glapissements. 12 Allusion, dâune part, Ă la thĂ©orie de la transposition dâart » chĂšre Ă ThĂ©ophile Gautier, et, dâ ... 13 La Vieille femme et lâenfant, National Gallery of Art de Washington, Collection Lessing Rosenwald. 14 LĂ©gende » est Ă prendre ici au sens que lui donne Baudelaire dans Les FenĂȘtres » Le Spleen de ... 18En rĂ©alitĂ© le dispositif scĂ©nographique mis en place actualise deux modĂšles, lâun narratif sous la forme de lâanecdote, lâautre, descriptif sous la forme de la vignette » ou de la gravure, que lâĂ©criture vise Ă transposer », par une reprĂ©sentation correspondante »12. Il existe en effet un dessin de Daumier13, approximativement contemporain du poĂšme en prose, qui peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme la lĂ©gende »14 du dessin. Jâaurai lâoccasion de revenir sur lâexploitation baudelairienne dâun cadre gĂ©nĂ©rique correspondant Ă la transposition narrative de la vignette ». 19La double conclusion du DĂ©sespoir de la vieille » invite Ă une interprĂ©tation simultanĂ©e du double sens, puisquâelle inscrit le poĂšme Ă la fois du cĂŽtĂ© dâune logique Ă©vĂ©nementielle extĂ©rieure et prosaĂŻque avec un sujet regardant racontant et du cĂŽtĂ© dâune logique Ă©vĂ©nementielle intĂ©rieure, poĂ©tique et gĂ©nĂ©ralisante avec une inversion mĂ©ditative du regard qui conduit le sujet Ă Ă©noncer les rĂ©percussions sensibles de ce qui est vu et narrĂ©, et lâemploi du nous » impliquant de fait le sujet. On pourra noter lâhabiletĂ© théùtrale » ou scĂ©nographique » de la dĂ©lĂ©gation de parole. 20La note prĂ©cĂ©dente invite Ă rapprocher Le DĂ©sespoir de la vieille » des FenĂȘtres ». Il sâagit encore dâune forme particuliĂšre de transposition dâart » la fenĂȘtre, ouverte peut donner de lâintĂ©rieur sur lâextĂ©rieur et fournir ainsi un cadre au tableau du peintre, ou, au contraire, ĂȘtre fermĂ©e et Ă©clairĂ©e, et fournir au peintre un autre cadre, intimiste et luministe. On sait lâintĂ©rĂȘt que Rembrandt, Le Caravage, De La Tour, et mĂȘme les petits maĂźtres romantiques, ont pu avoir pour les effets de lumiĂšre artificielle Ă travers une vitre, pour une scĂšne illuminĂ©e » de lâintĂ©rieur. Baudelaire retrouve par le rĂ©alisme de la fenĂȘtre le cadre symbolique de tableaux quâil se plaĂźt Ă lĂ©gender » en les intĂ©grant au cadre gĂ©nĂ©rique de lâĂ©crit moraliste, comme en tĂ©moignent le commencement et la fin du poĂšme Celui qui regarde du dehors Ă travers une fenĂȘtre ouverte ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenĂȘtre fermĂ©e. Il nâest pas dâobjet plus profond, plus mystĂ©rieux, plus fĂ©cond, plus tĂ©nĂ©breux, plus Ă©blouissant quâune fenĂȘtre Ă©clairĂ©e dâune chandelle. [...]Avec son visage, avec son vĂȘtement, avec son geste, avec presque rien, jâai refait lâhistoire de cette femme, ou plutĂŽt sa lĂ©gende, et quelquefois je me la raconte Ă moi-mĂȘme en câeĂ»t Ă©tĂ© un pauvre vieux homme, jâaurais refait la sienne tout aussi je me couche, fier dâavoir vĂ©cu et souffert dans dâautres que moi-mĂȘme. Peut-ĂȘtre me direz-vous Es-tu sĂ»r que cette lĂ©gende soit la vraie ? » Quâimporte ce que peut ĂȘtre la rĂ©alitĂ© placĂ©e hors de moi, si elle mâa aidĂ© Ă vivre, Ă sentir que je suis et ce que je suis ? 15 [...] jâai refait lâhistoire de cette femme [...] ». On notera le jeu du passĂ© et du prĂ©sent dan ... 16 Voir poĂšme en prose no IX, Le Mauvais Vitrier ». 21On pourrait mĂȘme parler ici de double ou triple syllepse dâune part, la conclusion complexe Ă©voque la reconstitution dâune histoire, qui nâest pas racontĂ©e, et la possibilitĂ© dâune autre histoire, qui reste virtuelle, et dâautre part, elle confie au lecteur ce quâest lâhistoire du sujet regardant, transcrivant15, sâinterrogeant par le biais de la rhĂ©torique oratoire sur la pertinence et la finalitĂ© de la reprĂ©sentation quâil met en scĂšne » et quâil suggĂšre plus quâil ne donne Ă voir. Par ailleurs, câest Ă lâĂ©vidence des visions de tableaux qui sont suggĂ©rĂ©es au lecteur dans la linĂ©aritĂ© mĂȘme de lâĂ©criture anecdotique » et moraliste. La syllepse concerne Ă©galement les Beaux-arts, dâautant que le marquage poĂ©tique est ici trĂšs sensible dans lâorganisation des signifiants, tout particuliĂšrement dans la disposition des rĂ©pĂ©titions. On pourra remarquer que le poĂšme qui suit Les FenĂȘtres » est intitulĂ© Le DĂ©sir de peindre ». Il semble lĂ©gitime de se demander si le modĂšle gĂ©nĂ©rique du salon », abondamment pratiquĂ© par Baudelaire, aprĂšs Diderot, nâa pas fortement influencĂ© lâĂ©criture dâun nombre important de petits poĂšmes en prose ». On peut aussi se demander si les Ă©normes difficultĂ©s rencontrĂ©es par le poĂšte, si lâon en croit les confidences de sa correspondance en ce qui concerne Le Spleen de Paris, ne sont pas en grande partie liĂ©es Ă cette extraction Ă©thique et esthĂ©tique de visions tableaux symboliques ou emblĂ©matiques de la vie poĂ©tique » quâil sâefforce de pratiquer, Ă partir dâĂ©vĂ©nements apparemment insignifiants de la vie quotidienne lâĂ©criture se trouve perpĂ©tuellement tendue entre les cadres narratifs et descriptifs de la reprĂ©sentation rĂ©aliste et ceux plus suggestifs de la reprĂ©sentation de la vie en beau »16. 22Le principe de la syllepse du genre rĂ©git la plupart des discours » tenus dans les diffĂ©rentes occurrences des poĂšmes en prose. Dans Le DĂ©sir de peindre », la conclusion relĂšve de lâhyperbate, si lâon reste dans la logique diĂ©gĂ©tique et mimĂ©tique de la prose ; il en va tout autrement si lâon se place dans une lecture interprĂ©tative qui prend en compte la syllepse du cadre gĂ©nĂ©rique. La premiĂšre partie de la clĂŽture du poĂšme renvoie au portrait dressĂ© par le peintre Ă©crivain Dans son petit front habitent la volontĂ© tenace et lâamour de la proie. Cependant, au bas de ce visage inquiĂ©tant, oĂč des narines mobiles aspirent lâinconnu et lâimpossible, Ă©clate, avec une grĂące inexprimable, le rire dâune grande bouche, rouge et blanche, et dĂ©licieuse, qui fait rĂȘver au miracle dâune superbe fleur Ă©close dans un terrain volcanique. 23La seconde partie, marquĂ©e par lâalinĂ©a, renvoie non seulement Ă lâincipit du poĂšme, mais Ă son objet sujet mĂȘme, le dĂ©sir », dont on pourra relever les trois occurrences, dans le titre, au dĂ©but et Ă la fin dĂ©but Malheureux peut-ĂȘtre lâhomme, mais heureux lâartiste que le dĂ©sir dĂ©chire !fin Il y a des femmes qui inspirent lâenvie de les vaincre et de jouir dâelles ; mais celle-ci donne le dĂ©sir de mourir lentement sous son regard. 24Il est vrai que ce qui retient lâattention dans ces poĂšmes est leur inscription dans un cadre pictural, dont le trait est tantĂŽt net, tantĂŽt symbolique, et qui permet de passer assez aisĂ©ment du rĂ©alisme prosaĂŻque Ă lâĂ©vocation et Ă la suggestion poĂ©tiques. 17 Le Spleen de Paris, no XXXIX. 25Dans Un Cheval de race »17, lâhistoire dâElle » est marquĂ©e par les deux actants que sont le Temps » et lâAmour ». Le premier paragraphe de conclusion clĂŽt lâĂ©vocation narrative UsĂ©e peut-ĂȘtre, mais non fatiguĂ©e, et toujours hĂ©roĂŻque, elle fait penser Ă ces chevaux de grande race que lâĆil du vĂ©ritable amateur reconnaĂźt, mĂȘme attelĂ©s Ă un carrosse de louage ou Ă un lourd chariot. 26Le deuxiĂšme rĂ©introduit le cheval de race » dans la sĂ©mantique fĂ©minine caractĂ©ristique de lâunivers poĂ©tique baudelairien Et puis elle est si douce et si fervente ! Elle aime comme on aime en automne ; on dirait que les approches de lâhiver allument dans son cĆur un feu nouveau, et la servilitĂ© de sa tendresse nâa jamais rien de fatigant. 18 .Le Spleen de Paris, no XVII. 19 Spleen et IdĂ©al », no XXXIII. Voir Ă ce propos lâĂ©dition de la PlĂ©iade et lâanalyse comparative ... 27Les quelques exemples que je viens de citer sâinscrivent tous dans une prose dont la transformation poĂ©tique passe par la mĂ©diation des Beaux-arts dont Baudelaire Ă©tait un spĂ©cialiste reconnu Ă son Ă©poque. La poĂ©ticitĂ© des poĂšmes citĂ©s nâest pas seulement marquĂ©e par la dualitĂ© conclusive ; les marques linguistiques, figuratives et rythmiques par exemple, comme les paronomases et autres rĂ©pĂ©titions, sont nombreuses. On peut remarquer la multiplication des alinĂ©as, qui parfois annoncent dĂ©jĂ le verset poĂ©tique cela est particuliĂšrement vrai dans une piĂšce que je nâai pas exploitĂ©e, parce quâelle a dĂ©jĂ fait lâobjet de nombreux commentaires. Il sâagit dâ Un HĂ©misphĂšre dans une chevelure »18, dont Baudelaire a produit une version en vers dans Les Fleurs du Mal, sous le titre La Chevelure »19. Baudelaire donne la prioritĂ© Ă une Ă©criture de la juxtaposition et de lâajout, voire du repentir visible, Ă la maniĂšre dâun peintre qui juxtapose des touches et des couleurs pour obtenir des effets particuliers de lumiĂšre. Cette technique dâĂ©criture contribue fortement Ă la poĂ©tisation du prosaĂŻque que le niveau de surface affiche ostensiblement. 28Autre marque linguistique qui sâinscrit subtilement dans ce que jâai appelĂ© la syllepse du genre, lâutilisation de coordonnants, connecteurs Ă©quivoques de logiques contradictoires inscrites dans le jeu des relations subtiles entre Ă©noncĂ© et Ă©nonciation. Ainsi, nombre de Et » ou de Et puis » en tĂȘte de paragraphe-verset constituent en rĂ©alitĂ© de vĂ©ritables embrayeurs ; câest le cas pour le dernier exemple citĂ©. 20 Le Spleen de Paris, no XV. 29Sans prĂ©tendre faire ici une Ă©tude exhaustive de la syllepse du genre dans Le Spleen de Paris, je souhaite cependant montrer trois exemples types de la modĂ©lisation complexe et caractĂ©ristique des petits poĂšmes en prose ». Comme je lâai affirmĂ©, les marques de la dualitĂ© organisationnelle des piĂšces du Spleen de Paris peuvent ĂȘtre explicites, et mĂȘme faire parfois lâobjet dâun commentaire mĂ©talinguistique, ou simplement implicites, lorsque rien de spĂ©cifiquement linguistique ne contribue Ă les signaler. Dans les exemples utilisĂ©s jusquâici, les indices invitant Ă un double mouvement interprĂ©tatif Ă©taient plus ou moins explicites. Il est un poĂšme en prose, qui, de ce point de vue, me semble emblĂ©matique il sâagit du GĂąteau »20. 30Ă premiĂšre lecture, Le GĂąteau » rapporte une anecdote, selon le procĂ©dĂ© du rĂ©cit enchĂąssĂ© dans une sĂ©quence descriptive. Le tableau au centre duquel est situĂ© le personnage/scripteur » sert Ă la fois de cadre Ă lâhistoire » et de miroir/correspondance » au paysage. Le sujet de lâĂ©nonciation, Ă©galement sujet de lâĂ©noncĂ©, situe dâemblĂ©e les circonstances de lâaction Je voyageais. Le paysage au milieu duquel jâĂ©tais placĂ© Ă©tait dâune grandeur et dâune noblesse irrĂ©sistibles. 31Câest par les yeux du je » personnage, en focalisation interne, que le lecteur voit le paysage. Le sujet de lâĂ©noncĂ©/sujet de lâĂ©nonciation voit â et fait voir â en correspondance » le paysage intĂ©rieur dont les caractĂšres de grandeur et de noblesse sont en analogie avec le paysage extĂ©rieur Mes pensĂ©es voltigeaient avec une lĂ©gĂšretĂ© Ă©gale Ă celle de lâamosphĂšre ; les passions vulgaires, telles que la haine et lâamour profane, mâapparaissaient maintenant aussi Ă©loignĂ©es que les nuĂ©es [...] ; mon Ăąme me semblait aussi vaste et aussi pure que la coupole du ciel [...]. 32Câest dans ce dĂ©cor » paisible et sublime, extĂ©rieurement et intĂ©rieurement, que se dĂ©roule lâaction proprement dite. Alors que le personnage est en train de dĂ©jeuner, survient lâĂ©vĂ©nement Devant moi se tenait un petit ĂȘtre dĂ©guenillĂ©, noir, Ă©bouriffĂ©, dont les yeux creux, farouches et comme suppliants, dĂ©voraient le morceau de pain. 33Ce petit ĂȘtre » est un futur actant, puisque son dĂ©sir est prĂ©cisĂ©, non seulement dans la description, mais encore dans le rĂ©cit Et je lâentendis soupirer, dâune voix basse et rauque, le mot gĂąteau ! 34LâĂ©volution de la situation est conforme Ă la description initiale. Le commentaire [...] jâen Ă©tais venu Ă ne plus trouver si ridicules les journaux qui prĂ©tendent que lâhomme est nĂ© bon » induit naturellement [...] jâen coupai pour lui une belle tranche que je lui offris ». Ă cet instant se produit lâincident â ou lâaccident â qui transforme la situation [...] au mĂȘme instant il fut culbutĂ© par un autre petit sauvage [...] ». Suit le rĂ©cit de la bataille dont lâĂąpretĂ© et la cruautĂ© sont soulignĂ©es, avant que nâintervienne la rĂ©solution finale, qui comporte une double sanction. La premiĂšre concerne les enfants, physiquement marquĂ©s et insatisfaits [...] lorsque enfin, extĂ©nuĂ©s, haletants, sanglants, ils sâarrĂȘtĂšrent par impossibilitĂ© de continuer, il nây avait plus, Ă vrai dire, aucun sujet de bataille ; le morceau de pain avait totalement disparu, et il Ă©tait Ă©parpillĂ© en miettes semblables aux grains de sable auxquels il Ă©tait mĂȘlĂ©. 35La seconde concerne le sujet de lâĂ©noncĂ© qui semble pourtant nâavoir jouĂ© que le rĂŽle fortuit de la cause indirecte de la bataille Ce spectacle mâavait embrumĂ© le paysage, et la joie calme oĂč sâĂ©baudissait mon Ăąme avant dâavoir vu ces petits hommes avait totalement disparu ; jâen restai triste assez longtemps, me rĂ©pĂ©tant sans cesse Il y a donc un pays superbe oĂč le pain sâappelle du gĂąteau, friandise si rare quâelle suffit pour engendrer une guerre parfaitement fratricide ! ». 36La construction du poĂšme est fondĂ©e sur un contraste paysage sublime » vs atroce bataille », que lâironie contribue largement Ă dĂ©crĂ©dibiliser dĂšs lâincipit. Sans compter lâemploi de segments descriptifs Ă caractĂšre gĂ©nĂ©rique, â images clichĂ©s issus du prĂ©romantisme » de Rousseau ou des romans de Stendhal â qui construisent un paysage plus symbolique que rĂ©aliste. DĂšs lors on pourra remarquer que le personnage, au double statut de sujet dâĂ©noncĂ© et de sujet dâĂ©nonciation, est dĂšs les premiĂšres lignes placĂ© au milieu du paysage ». Câest lui qui est thĂ©matisĂ© dans la logique profonde du poĂšme, sĂ©mantiquement et narrativement, dans une reprĂ©sentation scĂ©nographique trĂšs marquĂ©e par lâintertextualitĂ© et la symbolique poĂ©tique. Lâanecdote des enfants nâa ici quâun statut illustratif, constituant ce quâon appelle en termes de rhĂ©torique, une hypotypose. La premiĂšre transformation narrative est opĂ©rĂ©e sur le personnage par le paysage-actant, dont la noblesse » et la grandeur » sont irrĂ©sistibles » Bref, je me sentais, grĂące Ă lâenthousiasmante beautĂ© dont jâĂ©tais environnĂ©, en parfaite paix avec moi-mĂȘme et avec lâunivers. 37Sous la description apparaĂźt la narration lâĂ©nonciateur raconte un moment privilĂ©giĂ© de son existence, durant lequel une Ă©lĂ©vation physique a eu pour rĂ©sultat une Ă©lĂ©vation spirituelle. Le dĂ©sir dâidĂ©al » est momentanĂ©ment rĂ©alisĂ©. Toutefois, si haute soit lâĂ©lĂ©vation, on ne saurait se libĂ©rer des exigences de la matiĂšre », et le gros morceau de pain » sera Ă lâorigine de la chute » le sujet de lâĂ©noncĂ© appartient Ă la communautĂ© des humains et le mal est inhĂ©rent Ă sa nature ; obĂ©issant Ă la matiĂšre incurable », il est la cause premiĂšre de la bataille. La fonction illustrative de lâanecdote est nettement indiquĂ©e par le sujet de lâĂ©nonciation Ă quoi bon dĂ©crire une lutte hideuse qui dura plus longtemps que leurs forces enfantines ne semblaient le promettre ? 21 Une des dĂ©finitions du Spleen » qui est au cĆur de la poĂ©tique baudelairienne voir Spleen et ... 38Lâessentiel a Ă©tĂ© dit cruautĂ© et horreur dâun combat fratricide et inutile. La logique du rĂ©cit ne repose quâen apparence sur lâanecdote dont les invraisemblances ne sauraient Ă©chapper Ă lâattention du lecteur. En profondeur le contraste entre description et anecdote ne sert quâĂ faire ressortir la tristesse du je » et le caractĂšre incomprĂ©hensible de lâinexplicable coexistence du sublime et du mal dans un mĂȘme espace21, quâil soit extĂ©rieur ou intĂ©rieur. Le sujet de lâĂ©noncĂ©, spectateur Ă©merveillĂ© du paysage et involontaire du combat, ne cherche pas Ă interrompre un affrontement quâil a cependant provoquĂ© sans le vouloir malgrĂ© son attitude passive, il est Tactant principal de lâhistoire. Le discours du rĂ©cit met en scĂšne sa tentative de sâapproprier lâIdĂ©al â objet de toutes les valeurs, mais inaccessible â et rend compte de la fatalitĂ© dâun Ă©chec douloureusement ressenti au plan de lâhistoire, comme Ă celui du rĂ©cit. Le sujet mĂȘme de la bataille disparaĂźt lors du combat, et ce gĂąteau si dĂ©sirĂ© reste symbolique des illusions humaines sa possession est illusoire, et lâon peu noter le rapprochement conclusif et contextuel de pays, pain, gĂąteau et friandise » Il y a donc un pays superbe oĂč le pain sâappelle du gĂąteau, friandise si rare quâelle suffit pour engendrer une guerre parfaitement fratricide ! 22 Pour une analyse stylistique plus approfondie, voir De lâĂ©tude du style dans un texte littĂ©raire ... 39La poĂ©sie du poĂšme en prose no XV du Spleen de Paris rĂ©side essentiellement dans sa complexitĂ© discursive. Construit sur un contraste marquĂ© entre description et narration, il se dĂ©veloppe en rĂ©alitĂ© selon une double logique lâune est dynamique et narrative, lâautre est symbolique et statique22. La syllepse du genre permet lâexpression dâun nouveau lyrisme, et la manifestation dâun nouveau sujet lyrique » lâĂ©crivain poĂšte exploite un modĂšle combinatoire prosaĂŻque description et anecdote, dont il dĂ©crĂ©dibilise lâinterprĂ©tation attendue pour le reconfigurer poĂ©tiquement. 23 Le goĂ»t de la provocation appartient Ă la poĂ©tique et Ă lâesthĂ©tique baudelairiennes, non sans une ... 40Parmi les modĂšles prosaĂŻques utilisĂ©s dans Le Spleen de Paris, il en est dâautres dont je souhaite parler briĂšvement, ne serait-ce que par leur affichage un rien provocateur23. Ainsi le texte dâouverture du recueil semble restituer visiblement un Ă©change verbal extrĂȘmement commun, puisquâil actualise les conventions graphiques du dialogue. La disqualification de lâinterprĂ©tation prosaĂŻque repose, dâune part, sur le titre qui est singulier et non pluriel, LâĂtranger », et dâautre part, sur lâabsence de vĂ©ritable Ă©change verbal la distance posĂ©e entre les deux protagonistes au dĂ©but du dialogue ne cesse de sâaccroĂźtre et seule la valeur sĂ©mantique initiale de lâĂ©tranger » est cumulative, puisque lâon passe Ă extraordinaire Ă©tranger ». Il est vrai que la pĂ©riphrase homme Ă©nigmatique » nâĂ©tait pas anodine, et que le donc » qui apparaĂźt juste avant la derniĂšre rĂ©plique indique la rupture des possibilitĂ©s dâĂ©change. 41Ce premier poĂšme en prose du Spleen de Paris est Ă mettre en parallĂšle avec les nombreux poĂšmes de lâexil et du voyage, oĂč le poĂšte se situe en marge du monde et de la sociĂ©tĂ© de son Ă©poque. Proche parent du dĂ©shĂ©ritĂ© nervalien, il est celui qui a perdu sa gĂ©nĂ©alogie, sa famille et sa patrie. Enfance, paradis perdu, monde primitif et harmonieux issu de Swedenborg, de Platon ou de Pythagore, univers divin, quâimporte ! Tel est le pays que recherche dĂ©sespĂ©rĂ©ment Baudelaire par une prospection systĂ©matique et inspirĂ© du langage poĂ©tique. Ainsi sâexplique vraisemblablement la frĂ©quence dans sa poĂ©sie de ce lĂ -bas », gĂ©ographiquement si imprĂ©cis, mais tellement dĂ©sirĂ©. 42Dans LâĂtranger », cet adverbe, rĂ©pĂ©tĂ© deux fois, est enfermĂ© dans une sorte dâhĂ©mistiche problĂ©matique Ă lâintĂ©rieur dâun segment rythmĂ© comme un alexandrin, oĂč le nuage vaut par sa charge affective et son charme transitoire. Si le premier segment de la phrase Jâaime » rĂ©pond Ă la question initiale â Qui aimes-tu le mieux, [...] ? », reprise par â Eh ! quâaimes-tu donc, [...] ? », lâhyperbate, renforcĂ©e par les points de suspension, dĂ©veloppe un triple chiasme, soulignĂ© par lâaccentuation et lâassonance en [a] [...] les nuages qui passent... / lĂ -bas... lĂ -bas... / les merveilleux nuages ! 24 Voir op. cit., pp. 68-72. 43Fragile, voire illusoire systĂšme de valeurs, mais essentiel pour lâĂ©tranger », qui rejette toutes les propositions de son interlocuteur. Ce dernier, qui assure seul le dynamique de lâapparent dialogue, reste bloquĂ© dans la logique dâun interrogatoire Ă visĂ©e dominatrice et intĂ©grante. Dans la thĂ©matique baudelairienne, les nuages » appartiennent aux hautes sphĂšres de lâIdĂ©al par opposition Ă la sphĂšre terrestre et fangeuse du Spleen. La mise en scĂšne du discours sous la forme du dialogue correspond ici Ă une construction rhĂ©torique relevant de lâart oratoire comme de lâart poĂ©tique, dont la visĂ©e est celle dâune impossible mĂ©diation entre sujet social ou socialisĂ© » et sujet poĂšte ou poĂ©tique ». La tentative est Ă©videmment vouĂ©e Ă lâĂ©chec, comme le rĂ©vĂšle la faillite du pseudo-Ă©change verbal, mais câest dans lâartifice et lâironie dâune Ă©criture tendue vers un impossible dĂ©passement quâil faut chercher la dimension poĂ©tique de ce petit poĂšme en prose »24. 44Il me reste encore Ă reparler dâun texte dont la poĂ©ticitĂ© peut sembler Ă©vidente, puisquâil sâagit Ă premiĂšre vue dâun simple exercice de transposition artistique faire dâune vignette » un petit poĂšme en prose ». Il sâagit dâun paysage dont on sait lâimportance dans la poĂ©tique baudelairienne Le Port ». 25 Le Spleen de Paris, no XLI. Un port est un sĂ©jour charmant pour une Ăąme fatiguĂ©e des luttes de la vie. Lâampleur du ciel, lâarchitecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares sont un prisme merveilleusement propre Ă amuser les yeux sans jamais les lasser. Les formes Ă©lancĂ©es des navires, au grĂ©ement compliquĂ©, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent Ă entretenir dans lâĂąme le goĂ»t du rythme et de la beautĂ©. Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystĂ©rieux et aristocratique pour celui qui nâa plus ni curiositĂ© ni ambition, Ă contempler, couchĂ© dans le belvĂ©dĂšre ou accoudĂ© sur le mĂŽle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le dĂ©sir de voyager ou de sâ 45La vignette nâest pas utilisĂ©e ici dans ce quâelle pourrait avoir de pittoresque et de spĂ©cifique, mais au contraire dans ce quâelle a de conventionnel le port » est un paysage clichĂ©, rĂ©duit Ă ses Ă©lĂ©ments gĂ©nĂ©riques ciel, nuages, mer, phares, navires, houle, belvĂ©dĂšre, mĂŽle ». Le port » du titre devient, dĂšs la premiĂšre ligne du texte, indĂ©fini Un port [...] », et la syntaxe de lâattribut lui fait subir un transfert mĂ©tonymique qui le transforme en lieu habitable pour la subjectivitĂ© et lâimaginaire poĂ©tique un sĂ©jour charmant pour une Ăąme fatiguĂ©e des luttes de la vie ». Au paysage extĂ©rieur, rĂ©duit Ă ses composantes lexicales les plus simples et les moins colorĂ©es, se substitue un paysage intĂ©rieur, dont la colorisation et lâanimation dĂ©veloppent lâĂ©tymologie du mot charme », dont le principe actif se retrouve dans le syntagme sĂ©jour charmant », qui, par sa valeur concrĂšte et le choix des lexĂšmes relĂšve du registre poĂ©tique. Les infinitifs et leurs complĂ©ments, amuser les yeux sans les lasser, entretenir dans lâĂąme le goĂ»t du rythme et de la beautĂ©, contempler tous ces mouvements », liĂ©s Ă une sorte de plaisir mystĂ©rieux et aristocratique », dĂ©veloppent lâivresse poĂ©tique produite par la contemplation intĂ©riorisĂ©e du » port. Ce nâest pas seulement un donner Ă voir » qui est construit, mais un donner Ă ressentir ». La prose affichĂ©e dans Le Port » a Ă©tĂ© fortement travaillĂ©e de lâintĂ©rieur, selon des modes dâĂ©criture Ă©minemment poĂ©tiques les adjectifs ont Ă©tĂ© nominalisĂ©s et les noms attendus sont devenus de simples complĂ©ments. Ainsi, le ciel ample, les nuages Ă lâarchitecture mobile, la mer aux colorations changeantes, les phares qui scintillent, sont-ils devenus lâampleur du ciel, lâarchitecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares » la place de la substance objective et impersonnelle est devenue celle du sensible et du perceptif, celle de la subjectivitĂ©. Les frontiĂšres phrastiques ont suivi lâordre de la juxtaposition et de la liaison conclusive Et puis, [...] ». Le mouvement du texte, comme celui de chaque phrase, a Ă©tĂ© rĂ©glĂ© pour constituer une Ă©quivalence signifiante du rythme et de la beautĂ© » Ă©prouvĂ©s par le contemplateur, ivresse suprĂȘme produite par lâassociation paradoxale du mouvement et de lâimmobilitĂ©. Le port » reproduit les oscillations harmonieuses » quâimprime la houle aux formes Ă©lancĂ©es des navires » ; la vignette nâest plus quâun filigrane prĂ©texte, pour Ă©voquer cette ivresse poĂ©tique, tant recherchĂ©e par le poĂšte, du mouvement qui ne dĂ©place pas les lignes ». La syllepse du genre donne Ă lire une transposition scripturale de dessin conventionnel, et simultanĂ©ment, la vĂ©ritable correspondance poĂ©tique de ce paysage prosaĂŻque. Le travail des signifiants porte incontestablement les marques de la poĂ©ticitĂ©. 26 Le Thyrse », Le Spleen de Paris, no XXXII. 46La question thĂ©orique, et technique, qui reste en suspens est celle de savoir si lâon peut lĂ©gitimement donner Ă la syllepse lâextension que je propose. Au regard du fonctionnement mĂȘme de la syllepse, de son principe dâassemblage induisant une double signification, la syllepse du genre â des modĂšles gĂ©nĂ©riques dĂ©limitant les espaces dâĂ©criture et dâinterprĂ©tation â constitue une figure macrostructurale intĂ©ressante. Elle permet en effet dâapprocher une dĂ©finition dynamique du » poĂšme en prose, qui nâappartient Ă aucun genre, petit ou grand, prĂ©dĂ©fini, mais sâĂ©crit toujours sur la base dâun modĂšle gĂ©nĂ©rique prosaĂŻque, plus ou moins simple ou complexe, dont les conventions interprĂ©tatives usuelles sont plus ou moins subtilement disqualifiĂ©es pour ĂȘtre rĂ©interprĂ©tĂ©es au regard des modes dâexpression poĂ©tique. Câest effectivement une nouvelle forme de lyrisme que Baudelaire invente avec les petits poĂšmes en prose », dont les constantes ne relĂšvent pas des stabilitĂ©s formelles mais dâune dualitĂ© dynamique de lâĂ©criture. Câest ce que le poĂšte a vraisemblablement indiquĂ© lorsquâil a fait du Thyrse »26 lâemblĂšme du gĂ©nie de Franz Liszt et, sans doute, le symbole poĂ©tique du Spleen de Paris Et quel est, cependant, le mortel imprudent qui osera dĂ©cider si les fleurs et les pampres ont Ă©tĂ© faits pour le bĂąton, ou si le bĂąton nâest que le prĂ©texte pour montrer la beautĂ© des pampres et des fleurs ? [...] â Le bĂąton, câest votre volontĂ©, droite, ferme et inĂ©branlable ; les fleurs, câest la promenade de votre fantaisie autour de votre volontĂ© ; câest lâĂ©lĂ©ment fĂ©minin exĂ©cutant autour du mĂąle ses prestigieuses pirouettes. Ligne droite et ligne arabesque, intention et expression, roideur de la volontĂ©, sinuositĂ© du verbe, unitĂ© du but, variĂ©tĂ© des moyens, amalgame tout-puissant et indivisible du gĂ©nie, quel analyste aura le dĂ©testable courage de vous diviser et de vous sĂ©parer ? 47Ă vrai dire, si lâon continuait lâanalyse et la rĂ©flexion hors du cadre des petits poĂšmes en prose », on pourrait se demander si la syllepse, Ă©tendue Ă lâensemble des textes littĂ©raires, ne pourrait pas se substituer avantageusement Ă des concepts pertinents, mais flous, tels quâ Ă©criture oblique » ou opaque », ambiguĂŻtĂ© », Ă©quivoque », puisque, de toutes façons, le discours littĂ©raire ne dit jamais tout Ă fait ce quâil a lâair de dire, mais autre chose encore.
Le Spleen de Paris, Ă©galement connu sous le titre Petits poĂšmes en prose, est un recueil posthume de poĂ©sies en prose de Charles Baudelaire, Ă©tabli... Lire la suite 18,00 ⏠Neuf Poche En stock 4,70 ⏠En stock 7,60 ⏠ExpĂ©diĂ© sous 3 Ă 6 jours 2,00 ⏠Ebook TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 1,99 ⏠TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 1,99 ⏠TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 20,99 ⏠TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 23,99 ⏠TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 1,99 ⏠Grand format Actuellement indisponible 22,71 ⏠ExpĂ©diĂ© sous 2 Ă 4 semaines LivrĂ© chez vous entre le 13 septembre et le 27 septembre Le Spleen de Paris, Ă©galement connu sous le titre Petits poĂšmes en prose, est un recueil posthume de poĂ©sies en prose de Charles Baudelaire, Ă©tabli par Charles Asselineau et ThĂ©odore de Banville. Il a Ă©tĂ© publiĂ© pour la premiĂšre fois en 1869 dans le quatriĂšme volume des oeuvres complĂštes de Baudelaire publiĂ© par l'Ă©diteur Michel Levy aprĂšs la mort du poĂšte. Ce recueil fut conçu comme un " pendant " aux Fleurs du Mal. Baudelaire y fait l'expĂ©rience d'une " prose poĂ©tique, musicale sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtĂ©e pour s'adapter aux mouvements lyriques de l'Ăąme, aux ondulations de la rĂȘverie, aux soubresauts de la conscience ". Le recueil de Baudelaire comprend les poĂšmes suivants A ArsĂšne Houssaye I. L'Etranger II. Le DĂ©sespoir de la vieille III. Le Confiteor de l'artiste IV. Un plaisant V. La Chambre double VI. Chacun sa chimĂšre VII. Le Fou et la VĂ©nus VIII. Le Chien et le Flacon IX. Le Mauvais Vitrier X. A une heure du matin XI. La Femme sauvage et la Petite-maĂźtresse XII. Les Foules XIII. Les Veuves XIV. Le Vieux Saltimbanque XV. Le GĂąteau XVI. L'Horloge XVII. Un hĂ©misphĂšre dans une chevelure XVIII. L'Invitation au voyage 2e version XIX. Le Joujou du pauvre XX. Les Dons des fĂ©es XXI. Les Tentations ou Eros, Plutus et la Gloire XXII. Le CrĂ©puscule du soir XXIII. La Solitude XXIV. Les Projets XXV. La Belle DorothĂ©e XXVI. Les Yeux des pauvres XXVII. Une mort hĂ©roĂŻque XXVIII. La Fausse Monnaie XXIX. Le Joueur gĂ©nĂ©reux XXX. La Corde XXXI. Les Vocations XXXII. Le Thyrse XXXIII. Enivrez-vous XXXIV. DĂ©jĂ ! XXXV. Les FenĂȘtres XXXVI. Le DĂ©sir de peindre XXXVII. Les Bienfaits de la lune XXXVIII. Laquelle est la vraie ? XXXIX. Un cheval de race XL. Le Miroir XLI. Le Port XLII. Portraits de maĂźtresses XLIII. Le Galant Tireur XLIV. La Soupe et les Nuages XLV. Le Tir et le CimetiĂšre XLVI. Perte d'aurĂ©ole XLVII. Mademoiselle Bistouri XLVIII. Anywhere out of the World XLIX. Assommons les Pauvres ! L. Les Bons Chiens Epilogue. Date de parution 01/02/2019 Editeur ISBN 978-2-322-12757-3 EAN 9782322127573 Format Grand Format PrĂ©sentation BrochĂ© Nb. de pages 156 pages Poids Kg Dimensions 14,8 cm Ă 21,0 cm Ă 1,1 cm Biographie de Charles Baudelaire Charles Baudelaire est un poĂšte français. NĂ© Ă Paris le 9 avril 1821, il meurt dans la mĂȘme ville le 31 aoĂ»t 1867. Il occupe une place considĂ©rable parmi les poĂštes français pour un recueil certes bref au regard de l'oeuvre de son contemporain Victor Hugo Baudelaire s'ouvrit Ă son Ă©diteur de sa crainte que son volume ne ressemblĂąt trop Ă une plaquette..., mais qu'il aura façonnĂ© sa vie durant Les Fleurs du mal.
Le Spleen de Paris Repris en 1864 sous le titre Petits poĂšmes en prose retour Ă l'accueil de l'oeuvre retour au choix de l'oeuvre DĂ©finition Taille du texte 1 2 3 TĂ©lĂ©charger cette oeuvre Je voyageais. Le paysage au milieu duquel j'Ă©tais placĂ© Ă©tait d'une grandeur et d'une noblesse irrĂ©sistibles. Il en passa sans doute en ce moment quelque chose dans mon Ăąme. Mes pensĂ©es voltigeaient avec une lĂ©gĂšretĂ© Ă©gale Ă celle de l'atmosphĂšre; les passions vulgaires, telles que la haine et l'amour profane, m'apparaissaient maintenant aussi Ă©loignĂ©es que les nuĂ©es qui dĂ©filaient au fond des abĂźmes sous mes pieds; mon Ăąme me semblait aussi vaste et aussi pure que la coupole du ciel dont j'Ă©tais enveloppĂ©; le souvenir des choses terrestres n'arrivait Ă mon coeur qu'affaibli et diminuĂ©, comme le son de la clochette des bestiaux imperceptibles qui paissaient loin, bien loin, sur le versant d'une autre montagne. Sur le petit lac immobile, noir de son immense profondeur, passait quelquefois l'ombre d'un nuage, comme le reflet du manteau d'un gĂ©ant aĂ©rien volant Ă travers le ciel. Et je me souviens que cette sensation solennelle et rare, causĂ©e par un grand mouvement parfaitement silencieux, me remplissait d'une joie mĂȘlĂ©e de peur. Bref, je me sentais, grĂące Ă l'enthousiasmante beautĂ© dont j'Ă©tais environnĂ©, en parfaite paix avec moi-mĂȘme et avec l'univers; je crois mĂȘme que, dans ma parfaite bĂ©atitude et dans mon total oubli de tout le mal terrestre, j'en Ă©tais venu Ă ne plus trouver si ridicules les journaux qui prĂ©tendent que l'homme est nĂ© bon; - quand la matiĂšre incurable renouvelant ses exigences, je songeai Ă rĂ©parer la fatigue et Ă soulager l'appĂ©tit causĂ©s par une si longue ascension. Je tirai de ma poche un gros morceau de pain, une tasse de cuir et un flacon d'un certain Ă©lixir que les pharmaciens vendaient dans ce temps-lĂ aux touristes pour le mĂȘler dans l'occasion avec de l'eau de neige. Je dĂ©coupais tranquillement mon pain, quand un bruit trĂšs lĂ©ger me fit lever les yeux. Devant moi se tenait un petit ĂȘtre dĂ©guenillĂ©, noir, Ă©bouriffĂ©, dont les yeux creux, farouches et comme suppliants, dĂ©voraient le morceau de pain. Et je l'entendis soupirer, d'une voix basse et rauque, le mot gĂąteau! Je ne pus m'empĂȘcher de rire en entendant l'appellation dont il voulait bien honorer mon pain presque blanc, et j'en coupai pour lui une belle tranche que je lui offris. Lentement il se rapprocha, ne quittant pas des yeux l'objet de sa convoitise; puis, happant le morceau avec sa main, se recula vivement, comme s'il eĂ»t craint que mon offre ne fĂ»t pas sincĂšre ou que je m'en repentisse dĂ©jĂ . Mais au mĂȘme instant il fut culbutĂ© par un autre petit sauvage, sorti je ne sais d'oĂč, et si parfaitement semblable au premier qu'on aurait pu le prendre pour son frĂšre jumeau. Ensemble ils roulĂšrent sur le sol, se disputant la prĂ©cieuse proie, aucun n'en voulant sans doute sacrifier la moitiĂ© pour son frĂšre. Le premier, exaspĂ©rĂ©, empoigna le second par les cheveux; celui-ci lui saisit l'oreille avec les dents, et en cracha un petit morceau sanglant avec un superbe juron patois. Le lĂ©gitime propriĂ©taire du gĂąteau essaya d'enfoncer ses petites griffes dans les yeux de l'usurpateur; Ă son tour celui-ci appliqua toutes ses forces Ă Ă©trangler son adversaire d'une main, pendant que de l'autre il tĂąchait de glisser dans sa poche le prix du combat. Mais, ravivĂ© par le dĂ©sespoir, le vaincu se redressa et fit rouler le vainqueur par terre d'un coup de tĂȘte dans l'estomac. A quoi bon dĂ©crire une lutte hideuse qui dura en vĂ©ritĂ© plus longtemps que leurs forces enfantines ne semblaient le promettre? Le gĂąteau voyageait de main en main et changeait de poche Ă chaque instant; mais, hĂ©las! il changeait aussi de volume; et lorsque enfin, extĂ©nuĂ©s, haletants, sanglants, ils s'arrĂȘtĂšrent par impossibilitĂ© de continuer, il n'y avait plus, Ă vrai dire, aucun sujet de bataille; le morceau de pain avait disparu, et il Ă©tait Ă©parpillĂ© en miettes semblables aux grains de sable auxquels il Ă©tait mĂȘlĂ©. Ce spectacle m'avait embrumĂ© le paysage, et la joie calme oĂč s'Ă©baudissait mon Ăąme avant d'avoir vu ces petits hommes avait totalement disparu; j'en restai triste assez longtemps, me rĂ©pĂ©tant sans cesse "Il y a donc un pays superbe oĂč le pain s'appelle du gĂąteau, friandise si rare qu'elle suffit pour engendrer une guerre parfaitement fratricide!" La poĂ©sie n'a pas d'autre but qu'elle-mĂȘme. - La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu'il n'existe pas. - Mais qu'importe l'Ă©ternitĂ© de la damnation Ă qui a trouvĂ© dans une seconde l'infini de la jouissance ! - La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu'il n'existe pas. - Il n'existe que trois ĂȘtres respectables le prĂȘtre, le guerrier, le poĂšte. Savoir, tuer et crĂ©er. - Il n'est pas de plaisir plus doux que de surprendre un homme en lui donnant plus qu'il n'espĂšre. - Il y a dans l'acte de l'amour une grande ressemblance avec la torture ou avec une opĂ©ration chirurgicale. - Ce qui est créé par l'esprit est plus vivant que la matiĂšre. - Manier savamment une langue, c'est pratiquer une espĂšce de sorcellerie Ă©vocatoire. - Donnez moi la force et le courage de contempler mon cĆur et mon corps sans dĂ©goĂ»t. - Pourquoi les dĂ©mocrates n'aiment pas les chats, il est facile de le deviner. Le chat est beau; il rĂ©vĂšle des idĂ©es de luxe, de propretĂ©, de voluptĂ©, Salon de 1845 Le Salon de 1846 Le Salon de 1859 La Fanfarlo Les Fleurs du mal, premiĂšre Ă©dition 1857 Les Fleurs du mal, seconde Ă©dition 1861 Le Spleen de Paris Mon coeur mis Ă nu Les Paradis artificiels Comment on paie ses dettes quand on a du gĂ©nie Conseils aux jeunes littĂ©rateurs Les Drames et les romans honnĂȘtes Peintres et aquafortistes Morale du joujou Madame Bovary par Gustave Flaubert Du Vin et du Haschisch FusĂ©es Le musĂ©e classique du bazar Bonne-Nouvelle Exposition universelle Les MisĂ©rables par Victor Hugo Richard Wagner et TannhĂ€user Ă Paris Le peintre de la vie moderne Choix de maximes consolantes sur l'amour L'Ă©cole paĂŻenne Les fleurs du mal, fleurs maladives, la fleur du mal, fleurs du mal de Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal Le Spleen de Paris, Les Petits poĂšmes en prose,poĂ©sie en prose, recueil majeur. Le Spleen de Paris e-coursier, envoi de fichiers volumineux "Faut-il qu'un homme soit tombĂ© bas pour se croire heureux."
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